Arnaud Finistre, photographe de presse

Arnaud est venu au collège Rameau le lundi 14 décembre dans le cadre du projet Kaléidoscope. Il est photographe et travaille pour la presse nationale et des ONG (Organisations-Non-Gouvernementales telles que Médecins Sans Frontière). Il est venu nous montrer quelques bases de la photographie. Il nous a aussi montré des photos qu’il a pris, certaines étaient faites en ombres chinoises, d’autres avaient été prises dans des pays en conflit. Le 29 janvier, Arnaud est revenu nous voir au Clos de Pouilly et, après avoir pris quelques photos de Lassana Bathily, il a eu la gentillesse de répondre à nos questions.

Quel est votre parcours professionnel ?

Il est particulier parce qu’en fait j’ai toujours voulu faire ce métier mais je n’ai pas suivi le bon chemin pour y arriver. J’ai découvert la photographie j’avais 7 ans, j’étais très jeune puis j’ai fait des études qui m’ont mené vers complétement autre chose. J’ai fait un master en communication où on apprend à manier les mots et l’image c’est là que ça rejoint mon travail de photo-journaliste d’aujourd’hui. J’ai travaillé pendant 5 ans dans la presse quotidienne régionale. Dans Le Bien-Public par exemple, où au début j’écrivais des articles et je faisais de la photo puis après je ne faisais plus que de la photo) après j’ai travaillé avec une agence de presse et maintenant je suis devenu indépendant, je travaille avec la presse nationale et des ONG. Je travaille avec une grosse agence de presse internationale.

Comment vivez-vous vos séjours dans les pays en conflit ?

C’est des situations qui sont loin d’être simples. Faut apprendre à faire confiance à des gens qu’on ne connait pas forcément. On est dans des circonstances qui sont parfois violentes. Généralement je suis accompagné par ce qu’on appelle un « fixeur » c’est une personne de confiance qui connait les personnes sur place, qui connait les situations, qui va faire le traducteur, qui va parfois être votre chauffeur. Quand je travaille pour une ONG, par exemple, dans une situation compliquée souvent je travaille avec un fixeur qui va me permettre de rentrer en contact avec la population locale.

Est-ce que vous êtes protégé dans ces cas-là ?

Alors je ne suis pas un bon exemple là-dessus parce que j’ai couvert des guerres en Lybie ou en Irak où on n’était pas très protégés. On n’avait pas de casque, pas de gilets par balles, alors que c’est quand même la base. Avec tout cet attirail, on est plutôt bien protégé mais on est aussi beaucoup plus lourd, c’est très lourd un gilet par balles ça pèse près de 25 kg, le casque c’est très lourd aussi. Quand on arrive chez les gens avec ce matériel sur soi c’est un peu particulier, un peu étrange. Du coup, moi je travaillais différemment. Mais aujourd’hui j’ai fait une formation de reportage en zone de guerre et on m’a clairement fait comprendre que c’était une obligation de travailler protégé donc, depuis, je travaille différemment.

Est-ce que vous photographiez en rafale ou est-ce que vous vous fiez à votre instinct pour que la photo soit bonne ?

Oui je me fie beaucoup à mon instinct parce que la photographie comme je la pratique, c’est-à-dire sur le vif, il y a une grosse part d’instinct. On a des réflexes, on réagit vite, on doit anticiper aussi parfois mais il est vrai qu’avec les appareils qu’on a aujourd’hui on a la possibilité de faire de la rafale et quand ça va très vite, sur des situations qu’on ne veut pas rater, oui on se permet de faire trois, quatre, cinq images sur une situation qui va durer une demie seconde mais qui va avoir beaucoup de sens au final. Donc il ne faut pas rater ce moment-là. On travaille dans l’instant, sur des choses qui vont parfois très vite et, quand ça a vraiment du sens, on met toutes les chances de notre côté avec la rafale.

Mais ce n’est pas systématique. Je l’utilisais beaucoup sur des photos de sport pour le Bien-Public, par exemple, mais quand je fais des portraits (comme tout à l’heure avec Lassana Bathily), je prends du temps pour discuter avec la personne, pour trouver le bon endroit où la photographier. Ça dépend vraiment des moments.

Est-ce qu’il existe un sujet qui vous tient à cœur pour un reportage ?

J’ai traité pas mal de sujets qui me tenaient à cœur parce que j’ai la chance de pouvoir choisir les reportages que je veux traiter. Il y a un sujet qui me tient très à cœur ces dernières années c’est la question de la condition des Rohingyas*, c’est un peuple qui a été victime d’un génocide, qui a été chassé de son pays et aujourd’hui ils sont apatrides. Et personne ne veut vraiment d’eux. Quand ils arrivent dans un pays, ils arrivent comme réfugiés mais n’obtiennent pas le statut de réfugiés donc ils se retrouvent dans des situations très compliquées… Je les ai vus dans des camps de réfugiés au Bengladesh, je les ai vus en Malaisie travailler sur des chantiers au noir sans avoir de droits ni gagner beaucoup d’argent. Ce peuple apatride qui n’a pas de droit nulle part on en a beaucoup parlé quand ils sont partis en masse de la Birmanie mais depuis on n’en parle de moins en moins et on parle de plusieurs millions de personnes et leur situation est assez douloureuse.

Propos recueillis par Karen, Lilirose, Irénée & Zakaria

* Les Rohingyas vivaient au Myanmar (ex-Birmanie), c’est un peuple qui a été persécuté par l’État Birman à cause de sa religion musulmane et qui a été obligé de fuir au Bengladesh (plus de 700 000 déplacés en 2017). Ils n’ont pas d’identité légale et sont considérés comme inexistants par leur pays officiel.

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